Les gyozas : un accord parfait
Le domaine viticole Hinterland est basé dans le comté de Prince Edward en Ontario, la région « honteuse » de la culture des vignes européennes, qui doivent souvent être enterrées en hiver ou bien équipées d’une protection dont la forme rappelle une manche, mais qui ne sont pas à sous-estimer. En vin mousseux, elles se révèlent vives et mordantes. Produites en vins nature, elles sont aussi défiantes et un peu excentriques. Le vinificateur, Jonas, se surnomme lui-même « le Viking ». Leur Red Herring Syrah, dans les années où Dame Nature permet sa production, est un feu d’airelles rouges incandescent. Il ne peut cependant pas être fabriqué chaque année. En effet, des températures inférieures à -22 °C pendant l’hiver peuvent endommager définitivement la vigne. Le gel est un ennemi de taille. Tous ces facteurs rendent leur syrah pratiquement abominable. C’est un miracle que le pinot noir, le cépage le moins résistant de tous, continue d’éviter l’extinction. Avec des gyozas, le Blanc de Noirs (raisins noirs transformés en vin clair et pétillant) Hinterland s’accorderait parfaitement. Même si le pinot noir a du mal à pousser (une petite brise printanière risque d’entraver sa croissance), il est une merveille à la table à manger. Ce cépage relève avec brio les défis posés par des saveurs prononcées dans vos plats, comme les légumes racines trop sucrés, ou l’umami du soja, qui mettrait un autre raisin à genoux – amer et vaincu. En vin mousseux, le pinot noir anticipe tout cela. Ses bulles, mariées à des gyozas substantiels et une sauce ponzu bien dégoulinante, rappelleront en bouche une danse des rubans de niveau olympique. Le Blanc de Noirs Hinterland, cultivé par-dessus des coquillages fossilisés, touche à l’argument selon lequel le vin peut intégrer des aspects du sol – comme le sel d’un océan asséché – et l’apparier à n’importe quel aliment avec le même traitement et la même délicatesse.
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